L’analyse des facteurs explicatifs des comportements d’autoprotection (prévention primaire) et d’auto-assurance (prévention secondaire) des assurés est une étape nécessaire dans l’évaluation de la soutenabilité du marché de la prévention. Au-delà de l’effet des caractéristiques démographiques (âge, genre, niveau d’éducation,…), l’originalité de la démarche consiste ici à évaluer l’impact de certains biais comportementaux mis en évidence par les travaux de l’économie comportementale.
Les biais comportementaux usuellement révélés par les travaux de l’économie comportementale sont aujourd’hui assez bien identifiés. Ils font référence aux problèmes d’inertie face aux choix, à la procrastination, à l’aversion à la perte, à la perception biaisée des risques, des capacités de soi et des autres, aux effets de cadrage….. Alors que la méthode expérimentale en laboratoire permet aujourd’hui d’identifier ces anomalies comportementales, il reste encore à évaluer la persistance de ces biais “sur le terrain”. Pour cela, on dispose désormais de deux moyens d’investigation complémentaires.
D’une part, des enquêtes en matière de santé et de protection sociale (ESPS, SHARE) dont les questionnaires permettent d’identifier certains comportements jusqu’ici inobservables par les économètres, comme l’aversion au risque, l’impatience ou l’altruisme. Dans notre analyse des déterminants des comportements d’auto-prévention, ces bases de données seront enrichies des données originales issues des portefeuilles de clientèle des assureurs soutiens de la Chaire, comme notamment l’enquête menée en 2015 par Harmonie Mutuelle. Cette démarche reste cependant conditionnée par l’existence de biais fondés par le caractère déclaratif (comme l’effet de demande).
D’autre part, il s’agit là de développer un véritable outil d’investigation expérimentale sur le terrain. L’idée ici est de reprendre le dispositif expérimental tel qu’il a été conçu originellement par V. Smith mais en l’adaptant afin de toucher directement les acteurs économiques dans leur propre environnement. Ceci correspond à l’évolution récente du recours à l’expérimentation tel que le préconise par exemple Zacharias Maniadis, Fabio Tufano et John List en octobre 2017 (The Economic Journal).