Couverture santé, aléa moral et auto-prévention :
Le problème de la moralité aléatoire des assurés est un problème récurrent pour les assureurs. On étudie ici l’influence de la couverture assurance santé sur les comportements d’adhésion à l’auto-prévention.
L’originalité de la démarche est de contrôler, grâce aux informations fournies dans les enquêtes mobilisées (ESPS, SHARE) et les données originales de nos partenaires de la Chaire, l’influence des comportements sur l’auto-prévention.
Pour isoler l’effet pur d’aléa moral, on contrôle l’auto sélection des assurées en fonction de leurs types (niveaux de risque). Les résultats économétriques doivent permettre d’identifier, pour chaque type de prévention (primaire ou secondaire), la substituabilité ou complémentarité entre auto-prévention et couverture assurantielle.
Quel impact des programmes de prévention sur l’arbitrage « auto-prévention / assurance » des assurés ?:
La mise en place de l’Accord National Interprofessionnel (ANI) depuis le 1/01/2016, a participé au développement de programmes de prévention associés aux contrats collectifs d’assurance santé (mais par extension aussi aux contrats individuels), offert par les assureurs à leurs assurés.
On peut penser que cette offre, souvent associée à un objet connecté, a profondément affecté les comportements d’arbitrage des assurés entre l’auto-prévention et la couverture assurantielle.
La loi relative à la sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013, donne obligation à compter du 1/01/2016 à tout employeur du secteur privé de proposer à ses salariés une couverture santé complémentaire satisfaisant un niveau minimal de garanties. Sous cette impulsion illustrée par l’Accord National Interprofessionnel (ANI), les contrats de prévoyance collectifs négociés entre assureurs et partenaires sociaux ont enregistré en 2016 une croissance de plus de 2,7%. Les termes de l’ANI imposent qu’au moins 2% des cotisations soit consacré à la prévention santé. Les produits d’assurance santé proposés aux salariés des entreprises sont donc assortis (soit de manière inclusive ou sous forme de contrats de service) d’une offre “gratuite” de programmes de prevention. Associant suivis individualisés et / ou tarifs préférentiels chez les partenaires de l’assureur spécialisés dans les domaines de la nutrition, de la forme et du fitness, ces programmes constituent des “incitations douces “ pour modifier l’architecture des choix des assurés vers des options plus favorables à leur hygiene de vie, réduisant par la même les risques santé et leurs dommages. Ces programmes de prévention sont souvent associés à un objet connecté qui permet à l’assureur d’observer l’effort de prévention (hygiène de vie, bilans de santé) et de fait de réduire le risque d’aléa moral. Du côté de l’assuré l’offre d’un service de prévention individualisé réduit le coût de l’effort d’auto-prévention. On étudie ici l’impact de cet « effet de subvention » sur l’arbitrage (complémentarité ou substitution) opéré par l’assuré entre auto-prévention et couverture assurance santé selon que l’on se situe dans le cadre de la prévention primaire ou de la prévention secondaire. On peut en effet comprendre que sous la condition de révélation des informations fournies par l’objet connecté à l’assureur, ce dernier peut réduire les risques d’aléa moral et de sélection contraire. Toutefois si obligation est faite aux employeurs de proposer une assurance santé complémentaire à leurs salariés via l’ANI, celle-ci porte sur un panier de couverture minimal, laissant la liberté de choix à l’assuré du degré de couverture assurantielle. Ici encore des biais comportementaux peuvent mettre en cause l’adéquation optimale entre le profil de santé de l’assuré et le design de son contrat d’assurance santé. L’extension de l’analyse peut bien entendu être menée au titre des contrats individuels. A ce titre le choix du type de contrat (collectif versus individuel) sur l’adhésion à un programme de prévention reste en soit un sujet d’étude intéressant. Il oppose en effet une option « par défaut » via l’inclusion d’un service de prévention dans un contrat collectif, à une adhésion « volontaire » dans le cas d’un contrat individuel. Les prédictions théoriques obtenues sous plusieurs hypothèses comportementales (rationalité, littératie, biais comportemental) seront confrontées à des données issues de portefeuilles clientèles (Enquête Harmonie Mutuelle par exemple) et/ou soumises à des expériences naturelles.